28 juillet 2006

Parquet-moulure-cheminée


La classe.
Un pas de plus dans la catégorie « devenir adulte », c’est-à-dire un 2 pièces pour moi toute seule. Soit un véritable chemin à parcourir pour aller prendre un verre d’eau dans la cuisine, et sans saut d’obstacles. Plus besoin de bouger le lit pour atteindre mon carton à sous-vêtements, plus besoin de débrancher le frigo pour brancher le four, plus besoin de replier le lit tous les matins, plus d’excuses pour ne pas faire la cuisine et plus d’excuses pour que ce soit le bordel. Bon, au moins, je récupère un nouvel alibi béton pour le ménage : c’est beaucoup trop grand… Je vous laisse imaginer, je passe de 17m2 (mon proprio vient d’avouer sous la torture que ce n’était pas un 19m2) à 37m2. Sachant qu’un mètre carré c’est un mètre sur un autre mètre imaginez le nombre de coïts métriques dont je dispose actuellement ! Autant vous dire que je n’en reviens toujours pas : quand je passe une porte, c’est ENCORE chez moi ! Et vice et versa. Bon, sauf pour la porte d’entrée, d’accord. Vous chipotez, là, vous essayez de me gâcher mon plaisir. Jaloux.
Pour l’instant, les rideaux sont accrochés par une ficelle, ma plaque chauffante est collée à mon frigo et je dois monter sur les chiottes pour fermer le rideau de la salle de bains : je découvre les joies du vis-à-vis. D’ailleurs, on devrait dire vies-à-vies. Mais ce sont des inconvénients pratiques qui me plaisent, j’ai l’impression de passer par petites touches dans un quotidien définitivement différent. Ah tiens, maintenant t’as deux serrures. Tiens dis donc, qui a enlevé l’igloo du frigo ? Ah, mais il est drôlement près le voisin là. Et tout nu aussi… Mais que fait ce vélo dans ma chambre ? Putain, t’as CINQ chaises !!!
Joies et peurs du nouvel espace intime. Et faut quand même que je pose cette tringle de rideau de douche, mais ça nécessite une perceuse. Et je n’en suis pas là, je débute dans les grands espaces moi ! Dans les espaces adultes. J’avais bien repéré que, dans mon quotidien, j’allais plus vraiment en cours, que j’avais plus de partiels et que les travaux de groupes autour d’une bière avaient disparu. Mais de réaliser combien cela paraissait évident aux autres qu’il était temps que je prenne un "appart d’adulte", ça m’a foutu au pied du mur. Deux ans et demi ??? ça tiraille sévère dans les tréfonds là… Bin ouais, t’as une vie active maintenant. Et non, tu sais toujours pas ce que tu veux faire. Et encore pire, tu ne te bouges même pas le cul pour le savoir. Donc oui, deux ans et demi. Et cette question qui te pourrit parfois la vie, de moins en moins nettement et de moins en moins tragiquement, va peut-être bien falloir la régler. Posément, ou instinctivement, avec le cœur ou avec la tête, dans tous les cas, avec des couilles. Pardon. Avec du courage, quoi. Confusion et expression purement misogynes, je devrais me tapir de honte mais pour taper c’est pas pratique une fois tapie.
Jean Yanne n’a jamais payé ses impôts oui tout le monde le sait et moi depuis hier seulement et il disait qu’il ne devait rien à ce gouvernement de merde et qu’il ne lui donnerait pas un centime et je me suis dit que ce serait drôlement rigolo si tous les contribuables arrêtaient de payer pour cause de gouvernement de merde. "Cher Monsieur Trésor, en raison de fortes divergences avec les actions gouvernementales récentes, blablabla..." Ça ferait un joli trou dans l’abîme et une jolie pagaille et un petit renversement là, pouf. Anarchiste ? Bon bin voilà c’est réglé quand je fume de l’herbe je suis anar’. En écoutant Blues Lines c’est hyper agréable. C’est le disque le plus sensuel au monde. Dans ma discographie sexuelle, il occupe une place de choix. Oui. Messieurs, le jour où je vous fais le coup du Massive Attack, préparez le condom.
T. est venu ce soir, on a passé une demi-heure à parler de ma petite armoire. Passionnant. Des conclusions systémiques au niveau sociétal et essentiellement design. Oui, c’était après avoir fumé. Et avant le Massive Attack. Je rebondissais (au sens figuré du terme, hein) sur son étonnement face à mon armoire (j’aurais dû vous laisser terminer la phrase, vous vous seriez douté du sens figuré) (peu d’êtres humains rebondissent sur les étonnements. Et c’est bien dommage, bien regrettable ma foi, voilà une bonne raison de ne plus payer d’impôts, par exemple). Parce que mon armoire, elle est étonnante figurez-vous. Et moi, je le découvre à l’instant. Au détour des réactions de mes visiteurs. Presque 26 ans que je côtoie le « petit meuble de l’entrée » sans avoir jamais remarqué qu’il était de dimensions surprenantes. Et comme il ne ressemble ni à une armoire ni à une commode ni à quoi que ce soit, qu’on dirait un meuble d’enfant mais que le tiroir est drôlement haut, il laisse perplexe. (Je viens de faire tomber l’ordi en allant rebrancher mon portable. Une question : Technologie, pourquoi me hais-tu ?) Et donc, c’est l’atout mystérieux et élégant de l’appart. Putain, j’ai un atout mystérieux et élégant. Ça y est. Et je peux le foutre où je veux, pour mon frangin et moi ce sera toujours « le petit meuble de l’entrée », et pour les autres ce sera "la table de chevet pour géants". La vache, j’ai envie d’une clope, c’est nul cette restriction. Dix par jour. C’est d’un crédible, vraiment… D’autant que j’ai largement dépassé mon quota samedi soir. Ah j’avais aussi dit « plus de bières pendant 2 mois » et pareil, au panier ça, samedi soir. Alors je me suis rassurée avec le bien connu « bin c’était samedi soir quoi ». Ouais. Aucune volonté quoi. Aucune volonté le samedi soir, et c’est comme ça.

Les galets c’est pratique, y’a pas besoin de cadrer. Oui, c’est une photo prise un samedi.

Y'a quand même un type qui s'est suicidé par hyperthermie, en se foutant huit pulls sur lui et en attendant de crever de chaud, au sens complètement propre du terme. Bin ce mec-là, il avait pas froid aux yeux.

- vous lisez le magazine Ikéa aux chiottes vous ?!
- c'est toujours aux toilettes qu'on fait les plus grands projets.

13 juillet 2006

Cactus cachés




Partir sans se renseigner est un gage fantastique de surprises. On s'attend à voir un désert rouge flamboyant émaillé de cactus superbes, et on se retrouve au milieu de la jungle. La péninsule du Yucatan et le Chiapas sont donc des zones assez humides et totalement peuplées de choses verdoyantes entremêlées. C'est un bordel sans nom de fleurs et d'animaux improbables. Dressées au milieu de ces lianes et autres feuilles-hamacs, des pyramides Mayas. C'est grand. C'est tout plein d'émotions en cascades, parce que la pierre que tu regardes, là, elle te contemple avec des centaines d'années, ce qui lui confère une suprématie légèrement agaçante. Les iguanes se balladent là-dedans comme les pigeons à Paris. Mention spéciale aux iguanes punks, avec des crêtes, dont D. a dû prendre environ 68 photos. Faut dire qu'au niveau eye-contact avec les iguanes, D. a une longueur d'avance sur la majeure partie de l'humanité. Nous revenons donc avec une très belle galerie de portraits à la Lou Reed. De mon côté, j'ai davantage axé sur la prise de vue post-moderne, parce que mon vieil argentique n'ouvre son oeil qu'à moitié. Donc, sur un fond noir très noir, on entraperçoit des palmiers balancés dans le vent, la jungle, des pierres spectaculaires, des sculptures mayas inoubliables, la jungle, l'eau turquoise, la jungle et ah, c'est une patte de flamant rose, là. Ou une église.
Après cinq visites de sites sous 45°C, tartinées d'anti-moustique, de crème solaire et de sueur, telles d'intrépides aventurières traversant l'immensité spatio-temporelle sans coup férir, voici la question qui nous brûle encore aujourd'hui les lèvres :
Partant du principe que les Mayas étaient petits, voire minuscules, pourquoi leurs marches nous arrivent à la mi-cuisse, soit l'équivalent de leur bassin ? Que celui/celle, qui a la réponse s'empresse de la donner, nous sommes prêtes à sacrifier un porte clé "sous-commandant marcos" en contre-partie. Ce suspense nous a tenu en haleine jusqu'à la fin. Et nous a permis de nous muscler prodigieusement, parce que c'est important d'avoir des fesses de rêve, ne l'oublions jamais, surtout pas au sommet d'une pyramide.
Et le plus marrant, c'est que nous retrouvons cette propension à la hauteur dans la confection des dos d'âne, si on peut encore parler de dos d'âne. Tous les kilomètres, le bus ralentit, s'essouffle, tempête, rebondit. Ce n'est rien, c'est un dos d'âne. C'est ainsi que l'on se retrouve à faire San Cristobal de Las Casas / Merida en quatorze heures, en regardant le dernier Steven Seagal, ou en priant pour que D. ne soit pas malade au prochain virage.
Mais les voyages, ce sont évidemment des moments de rencontre fabuleux. Ah, les auberges de jeunesse, remplies de backpackers tous plus sexys les uns que les autres (filles comprises, merde alors). Fourmillement d'échanges interculturels prodigieux, où l'on constate que plein de sujets nous relient au plus profond de nos âmes, comme par exemple la coupe du monde. C'est bon de se sentir humain.
Alors voilà, le Mexique, c'est fantastique. Surtout en compagnie de D., qui est la seule personne de ma connaissance à chopper le mal de mer sur un hamac, à laisser une partie de son sac à dos dans chaque auberge de jeunesse, et à oublier le guide du routard dans un combi collectif. Au bout de 10 jours de voyage. Et surtout, qui ne sait pas distinguer un baobab d'un cactus, ce qui offre un large pannel de fous rires. Quand nous sommes allées nous coucher dans notre petite cabane au fond de la jungle, à Palenque, frémissantes de joie à l'idée de dormir entourées de cris fous poussés par les singes hurleurs, il y avait une grosse bestiole posée près de mon lit. Très près. Très grosse. C'était, à y regarder de plus près, un énorme cafard-blatte. Enorme. Je choppe l'anti-moustique mexicain, celui qui t'intoxique les poumons quand tu le mets, et je tente d'en asperger l'ennemi. Réaction de D. : "une seule question, est-ce que c'est un scorpion ?" "Ah non, non, c'est juste un gros cafard là sur mon oreiller, qui va me faire des chatouilles toute la nuit." "Bon, bin si c'est pas un scorpion, tout va bien, si tu veux on échange de lit, moi les cafards, ça me gêne pas."
Devant tant de bon sens, parce que c'est finalement vrai que "c'est pas la petite bête qui mangera la grosse", j'ai décidé d'adopter une attitude d'adulte responsable et de dormir avec le cafard. Bon. Je dois admettre que j'étais bien contente d'être emmitouflée dans mon sac à viande, avec un t-shirt et un pantalon. Comment ça il fait 40°C ?..
Sinon, D. a un sens prodigieux de l'orientation, elle vous repère le zocalo, la station de bus et l'auberge en deux coups d'oeil, et, scotchée au Guide Bleu, elle nous a offert trois cuillères de culture par heure. On a appris plein de trucs sur le style Puuc, qui est très joli, et sur le Jeu de Balle. Par exemple, en se positionnant au point A, et en tapant dans les mains, on entend 7 fois son écho. En regardant la sculpture de la pyramide entre 19h02 et 19h24, on s'aperçoit que les anneaux du serpent à plumes s'animent. Bref, des tas de choses de la sorte, sauf pour le coup des marches, où nous sommes restées bredouilles. Et à la fin, elle faisait bien la distinction cafard/scorpion, pélican/flamants roses, et j'étais de mon côté enfin capable d'arrêter de dire que nous étions dans la savane et qu'on allait voir des fjords mexicains. Donc je rectifie, nous étions au coeur de la jungle, et nous avons pris le bateau pour sillonner le fond d'un canyon.
Et nous avons réussi à motiver 6 personnes pour un réveil à 4h45, un bus à 6h et une heure de bateau, pour voir une colonie de flamants roses d'une grâce éblouissante. Ils marchent sur l'eau pour s'envoler, ils dansent au lieu de marcher, et leur cou s'enroule à l'infini. Et c'est rose, rose sur une mer bleue turquoise, avec en fond d'écran des mangroves qui plongent leurs racines dans l'eau. Joie.
Personne n'a voulu me croire, il faudra donc que je pense à vérifier, les flamants roses sont roses parce qu'ils mangent des crevettes. Si. J'insiste.
Sinon, pour vous insuffler encore un peu de rêve, je vous laisse prononcer ce qui suit à haute voix : Chichen Itza, Palenque, Coba, Uxmal, Tulum, Merida, San Cristobal, Valladolid, Isla Mujeres... ça sonne... et je vous épargne Cancun.
Prochaine destination, le Viêtnam, et avec un peu de chance, ils auront des cactus.

Et non, elle n'a pas fait l'amour en sombrero. Dommage, notre guide de conversation avait pourtant une partie "sexe". Mais comme on dit, en voyage, on ne peut pas TOUT faire.

Et demain, je déménage... Donc je m'en retourne à mes cartons, parce que l'étagère ne va pas se démonter toute seule.

Devant France/Italie :
- L'avantage avec le baby-foot, c'est qu'il n'y a pas de hors-jeu.
- C'est peut-être pour ça qu'on retransmet moins les matches.

4 juillet 2006

Mexique 1 - Miami 0

Même pas morte. Voilà l'état d'esprit dans lequel je me trouve en général après un voyage en avion, n'étant pas très portée sur l'apesanteur. Et là, c'est double dose. Commençons par la fin, ou autrement dit commençons par le pire. Elle a bien cru qu'elle ne reviendrait pas. Elle a bien pensé qu'un complot mondial avait organisé sa détention éternelle à Miami. Elle a notamment pensé à S. qui voulait récupérer son super ordi et à la Cigogne qui avait montré beaucoup d'intérêt rapport à ses nombreuses robes de cocktail au cas où un oiseau dans l'hélice l'eût clouée au sol. Plus de 48 heures pour revenir du Mexique, avouez que c'est ballot. Autant revenir en marchant, ne serait-ce que pour éviter les aéroports. Pour la petite histoire, sachez que le vol AA2192 du dimanche 2 juillet au départ de Cancun est parti à 17h au lieu de 15h, ce qui rendait impossible tout changement d'avion à New-York. Les bonhommes du guichet se sont montrés tout à fait aimables et compréhensifs et m'ont pondu un billet Cancun-Miami Miami-Londres Londres-Paris. C'était évidemment sans compter le retard sur le Cancun-Miami, retard qui a éloigné durablement la possibilité de rentrer, mais qui m'a permis de posséder pendant quelques heures une suite de rêve au Sofitel de Miami. Avec 10 dollars pour manger. Autant vous dire qu'au Sofitel de Miami, avec 10 dollars, on vous rit au nez. Heureusement il y avait une baignoire dans laquelle j'ai pu de nouveau tester cette fameuse théorie selon laquelle, lorsqu'on plonge un corps nu dans une baignoire remplie, elle déborde. Du coup, je suis repartie avec les petits échantillons de gel douche, je sais, honte sur moi, mais je suis geldouchophile. Plus de 24h à Miami, ç'aurait pu être vachement drôle. Bin non. Parce qu'avec les bagages, les chaussures de rando et 10 pesos en poche, Miami c'est pas vraiment recommandé par le Routard. Un américain m'a payé des bières, un italien m'a prêté son ordi pour que je fasse environ 10000 parties de solitaire, et une petite madame, française vivant à New-Orleans, a insisté pour me filer 15 dollars pour que je m'achète un truc à manger. Je pense que ma tête faisait peine à voir. D'autant plus qu'avec tout ça, j'ai perdu tout mon bronzage, c'est scandaleux.
Bon.
Voilà.
Comme dans les Cartoons, tout est bien qui finit bien. De toute façon ils ne pouvaient pas me garder à Guantanamo, je suis trop grande pour leurs uniformes.
Le Mexique au prochain épisode. Un épisode rempli de suspense et d'émotion, où les flamants roses disputent la primeur aux alligators, où les cactus se cachent et où l'on apprend que je suis un excellent anti-moustiques pour mes compagnons de dortoir. Où l'on gravit des pyramides Mayas en sandalettes romaines, où l'on découvre que les singes hurleurs ont un cri de lion, où l'on descend dans des grottes pour plonger dans des sources d'eau pure Maya (et qu'on saisit enfin comment fonctionne un tuba), où l'on comprend qu'à Cancun, pour aller sur la plage, il faut passer par les hôtels, et où D. perd le guide du Routard.

Où l'on rencontre des Américains, des Irlandais et des Franco-Suisses, ce qui donne, par exemple :
- So, you're getting married ?
- Yes, in 2 weeks.
- Where's your guy ?
- In Switzerland.
- Ah, il est Suisse ? (là, c'était moi)
- Yes, but also French, so that's great !
- Why ?
- 'cause he's half/half.
- ?
- Half-romantic, half-organized.

En bref, un épisode où l'on découvre où se cachent les hommes parfaits.